Respirer

          Depuis quelques décennies déjà, le pétrole, les usines, les machines, les gaz chimiques et les pesticides, enfin, la course à la production industrielle, viciaient l'air ambiant. Mais l'humanité commençait à prendre conscience de la pollution engendrée, et désormais l'avenir était aux énergies propres et renouvelables, tandis que les maladies pulmonaires pullulaient. Tout le monde misait beaucoup sur les scientifiques qui, à tous coins de rue désormais, présentaient leurs nouveaux produits écologiques.
          C'est alors qu'un conflit se manifesta du côté de l'Orient. Les grandes puissances commencèrent à faire des alliances, des traités, de guerre ou de paix, et bientôt commença la troisième guerre mondiale, qui serait plus destructrice que toutes les précédentes. L'heure n'était plus aux champs fleuris, aux pays boisés et aux prairies propres, mais aux gaz meurtriers, aux armes destructrices et aux mélanges explosifs. Les victimes se comptèrent par centaines de millions.
          Quand la guerre cessa enfin, elle laissa derrière elle quelques centaines d'humains tout au plus, rabougris, affamés et apeurés. Tous les survivants étaient infectés par les armes chimiques de la guerre, et tous avaient la respiration sifflante et difficile. La guerre, tel un raz-de-marée, avait tout détruit sur son passage, et eux qui avaient autrefois été au sommet de la chaîne alimentaire se retrouvaient aujourd'hui être des proies faciles et démunies. Leurs nouveaux prédateurs, plus endurcis par la pollution que les précédents, voyaient tout, entendaient tout, sentaient tout. Désormais, pour survivre, il fallait ne plus faire de bruit, devenir invisible, imperceptible. Renoncer à sa nourriture s'il le fallait, et au sommeil pour être toujours en alerte. Être toujours plus silencieux. Désormais, pour survivre, il fallait ne plus respirer.

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